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Qu'est-ce que la voix de tête, la voix de poitrine et la voix mixte ?
Toute personne ayant suivi des cours de chant avec différents professeurs pourra en témoigner : chacun a sa propre définition des notions de voix de poitrine et de voix de tête. Quant à la voix mixte, elle est souvent au cœur des débats les plus animés sur ce qu’elle est et ce qu’elle n’est pas.
Cette confusion naît d’un mélange complexe entre science, sensations corporelles, héritage culturel et influences stylistiques, sans oublier l’expérience unique de chaque chanteur.
Comment s’y retrouver et surtout, comment identifier ces fameuses voix en soi ? C’est la question à laquelle nous allons tenter de répondre.
Comment fonctionne notre voix ? (version très simple!)
Les termes “voix de tête”, “voix de poitrine” et encore moins “voix mixte” ne sont utilisés par la communauté scientifique et médicale. Ces appellations reposent davantage sur des sensations subjectives de vibration que sur une réalité anatomique et physiologique.
Et justement, tournons vers cette réalité. Malgré une grande complexité, on tâchera de rester le plus simple possible.
Le coeur de la voix: notre larynx
Situé à mi-hauteur dans le cou, à la base de langue et suspendu à l’os hyoïde, le larynx est un assemblage de cartilages, de ligaments et de muscles, qui relie la gorge à la trachée.
Ayant un rôle dans la respiration, la phonation, la déglutition ou encore la mise en apnée lors d’efforts musculaires, sa fonction physiologique principale est de protéger les voies respiratoires. La phonation n’est qu’une fonction secondaire.

Les plis vocaux: la source du son
Les plis vocaux, souvent appelés cordes vocales, sont au nombre de deux et sont fixés à l’avant sur le cartilage thyroïde et à l’arrière sur les cartilages aryténoïdes.
Au repos (respiration normale) : les plis vocaux sont ouverts, permettant le passage de l’air.
Lors de la phonation (parole ou chant) : les cartilages aryténoïdes se rapprochent, mettant les plis vocaux en vibration sous l’effet de la pression de l’air.



Ce phénomène de cycle vibratoire est à l’origine du son. Plus il y a de cycles par seconde, plus le son est aigu. Moins il y a de cycles, plus le son est grave. Une règle acoustique qui s’applique à tous les instruments de musique.
Quant au volume sonore, on va simplifier en disant qu’il dépend de l’épaisseur des plis vocaux. Plus ils sont épais, plus le son est puissant. À l’inverse, des plis minces produisent un son plus doux.

Le rôle des cartilages
On l’a dit, le larynx est un assemblage de cartilages. Cerains d’entre eux modifient directement la longueur des plis vocaux et donc leur tension et épaisseur.
- La tension pour leur capacité à vibrer plus ou moins rapidement (donc la hauteur du son)
- Leur épaisseur pour le volume.
Le cartilage thyroïde peut basculer vers l’avant, ce qui étire, tend les plis vocaux. Comme un élastique épais sur lequel on tire, l’épaisseur est donc moins importante. Et on l’a dit, moins d’épaisseur, c’est moins de volume.

Le cartilage thyroïde peut aussi basculer vers l’arrière, rendant les plis vocaux plus court et donc plus épais. Le volume sonore est plus important.

Le cartilage cricoïde peut lui aussi basculer et rendre les plis vocaux plus court et plus épais.

Mécanismes laryngés et modes vibratoires des plis vocaux
Enfin, il nous faut parler des mécanismes laryngés, appelés aussi modes vibratoires.
Notre production vocale repose sur deux mécanismes vibratoires (fonctionnements) principaux des plis vocaux :
Mécanisme I (Lourd)
En général et la plupart des individus, qu’importe leur genre, utilise le mécanisme I (dit Lourd) pour parler. Pour chanter, dans des hauteurs de notes relativement confortables, à moins qu’ils aient été entrainés pour faire autrement pour certains styles, ou qu’ils en aient pris l’habitude, ou encore que pour diverses raisons il leur soit difficile de le faire, c’est aussi le mécanisme I qui est le plus utilisé.
Mécanisme II (Léger)
Le mécanisme 2, (dit Léger), est présent dans de nombreux moments de notre quotidien. Nous l’utilisons naturellement lorsque nous parlons avec une voix plus aigüe. Il intervient également dans l’expression de nos émotions comme le rire, les cris de surprise ou de joie. Dans le chant, il est utilisé dans tous les styles soit comme base, soit comme manière de varier la texture, le timbre sonore.
Les différences entre les deux mécanismes
Les deux mécanismes vocaux se distinguent dans leur état naturelle (c’est à dire, si on ne les modifie pas ou qu’on ne leur ajoute pas de filtre) par des caractéristiques sonores spécifiques:
- Le mécanisme 1 (lourd) a une dynamique plus importante: il peut aller d’un son de faible volume à fort volume, produisant une voix puissante avec un timbre riche en harmoniques graves.
- Le mécanisme 2 (léger) a une dynamique moins importante: il génère une voix plus fluette avec un timbre clair et fin, riche en harmoniques aigües, plus aérienne et brillante.

Dans le larynx, c’est une bascule des cartilages arythénoides en arrière et un pivotement sur leur axe vers l’intérieur, qui va entrainer un changement de mécanisme (de I vers II) dans les deux sens.
Le plus important est que lorsque nous passons du mécanisme I au mécanisme II, le muscle au coeur des plis vocaux ne se contracte pas ou peu. De ce fait, ils ne s’accolent que faiblement ou pas. Et puisque comme nous l’avons vu, le volume sonore étant en grande partie dû à la surface d’accolement des plis vocaux, il en résulte dans ce mécanisme II, d’une absence de volume et d’intensité sonore, voire selon les individus, d’un son pauvre en harmoniques. Le son est relativement aéré ou soufflé et repose en grande partie, pour son rayonnement à l’extérieur, sur l’espace de résonance du conduit vocal.
Il est donc opposé au mécanisme I dans lequel les cartilages arythénoides sont en position plus “neutre” et où le muscle vocal se contracte permettant selon la configuration que lui donnent les autres cartilages, une certaine liberté d’épaisseur et donc de volume sonore.
Le yodel
Il n’y a pas de continuité dans le son lors du passage d’un mécanisme à un autre, dans un sens ou dans l’autre. Ce changement est brusque: il y a comme une cassure, comparable à un changement d’une boite de vitesse de voiture.
Parfois, ce changement ne s’entend pas ou ne se sent pas pour diverses raisons, mais cela ne veut pas dire qu’il n’a pas lieu. Chez la plupart des individus, femmes ou hommes, ce changement est audible, mais peut-être “caché” comme dans certains styles musicaux. A l’inverse, d’autres styles utilisent cette cassure à des fins esthétiques comme le Yodel ou le Youtse, chants folkloriques des pays alpins germanophones, chez les Pygmées d’Afrique équatoriale et bien d’autres cultures.

Une richesse de possibilités !
Le tableau ne serait pas complet sans préciser que les mécanismes I et II fonctionnent indépendamment des autres ajustements et mouvements des cartilages évoqués précédemment. Ces mouvements, qui allongent ou raccourcissent les plis vocaux, influencent directement la hauteur et le volume du son, et transforme également la forme du larynx et, par conséquent, celle du conduit vocal.
Ce conduit joue le rôle d’une caisse de résonance, un élément essentiel : une guitare électrique et une guitare acoustique peuvent avoir des cordes identiques, mais leur sonorité sera radicalement différente en raison de la forme et des dimensions de leur caisse de résonance.
D’une part, cette complexité confère à la voix une richesse que la simple distinction entre « voix de tête » et « voix de poitrine » ne saurait capturer.
D’autre part, bien que l’on puisse penser que basculer un cartilage vers l’arrière ou un autre vers l’avant revient au même, il faut reconnaître que la nature a conçu un système d’une remarquable ingéniosité : cette redondance garantit à la voix une fiabilité et une adaptabilité optimales, capables de répondre à toutes les exigences vocales et contextuelles.

Les termes de "voix de tête" et "voix de poitrine" dans tout ça ?
Et bien, ils n’ont tout simplement pas (plus) leur place. Ils appartiennent à une définition subjective de ressenti dans laquelle il faudrait percevoir des vibrations dans la poitrine ou dans la tête. Ils incluent le plus souvent une idée de hauteur, d’aigu ou de grave, d’un timbre particulier.
Comme tout cela n’est pas seulement du fait des plis vocaux, c’est une vision limitante.
Généralement, la voix de poitrine fait référence au mécanisme I et la voix de tête au II. Mais comme il a été dit en introduction, chacun fait sa petit cuisine: on mélange ce qu’il se passe au niveau des plis vocaux, des cartilages, du conduit vocal, d’une recherche esthétique, et des sensations corporelles.
Que cela ait eu une place dans une esthétique lyrique plus ou moins figée dans le temps, à une époque où des données scientifiques n’étaient pas les nôtres, peut se comprendre. Mais aujourd’hui? Non. Ce n’est que par commodité de langage et conservatisme que l’on emploie encore ces termes.
Le falsetto ou voix de fausset ?
Le falsetto en italien ou voix de fausset en français semble lui jouir d’un consensus sur sa définition en ce qu’il est un mode de production en mécanisme II.
La voix mixte ?
D’un point de vue anatomique, elle n’est pas un mécanisme des plis vocaux. Elle n’est qu’une création d’une communauté pédagogique du chant en difficulté à comprendre la complexité du larynx, d’agencement des plis vocaux et celui du conduit vocal.
Elle ne fait consensus chez personne, même parmi les plus grands pédagogues du chant lyrique des siècles derniers. Elle n’est d’ailleurs pas utilisée dans des approches de chant dit “modernes”.
Il serait plus plus approprié de parler des “voix mixtes”, (plutôt que de la voix mixte), qui sont des résultats sonores qui peuvent être très différents d’un style, ou d’un artiste à l’autre.
La voix de tête, voix de poitrine et voix mixte, selon les approches et méthodes pédagogiques
La méthode classique
Le chant classique est à l’origine des termes “voix de tête” et “voix de poitrine”, issus d’une époque où l’enseignement reposait davantage sur le ressenti et des images métaphoriques. La nécessité d’un chant non amplifié et la recherche d’une homogénéité de timbre sur toute la tessiture ont ancré cette terminologie dans l’apprentissage du chant lyrique.

De manière générale dans le chant classique, les hommes chantent principalement en mécanisme I, tandis que les femmes alternent entre le mécanisme I dans les graves et le mécanisme II dans les aigus.
Cependant, il s’agit d’une généralité. Lorsque certains chanteurs affirment ne pas sentir ou entendre de “cassure” ou considèrent que du fait de leur pupitre ou tessiture, il y a une continuité naturelle du son, cela traduit souvent une difficulté à identifier les mécanismes vocaux et les ajustements du larynx.
En effet, la recherche d’un son caractéristique du chant classique, avec son agrandissement de l’espace de résonance et l’ajout du “formant du chanteur” (chanter dans le masque), peuvent masquer les changements de mécanismes. D’autres stratégies, comme une certaine nasalité ou des ajustements du conduit vocal, viennent encore complexifier cette perception.
Enfin, dans un objectif de chanter des musiques actuelles, il faut considérer que l’apprentissage par le biais d’une méthode et techniques classiques peuvent rendre difficile l’adaptation à d’autres esthétiques vocales. De nombreux chanteurs formés dans ce cadre peinent à s’en défaire lorsqu’ils explorent d’autres styles musicaux.

Estill, CVT et autres courants de pédagogie moderne


Des méthodes comme Estill Voice Training ou la Complete Vocal Technique (CVT) proposent une vision plus “analytique” de la voix.
Estill décompose le son en “figures” et éléments combinables, correspondant à des états physiologiques des plis vocaux, du larynx et du conduit vocal (ex. : Sob, Cry, Speech, Belt, Falsetto). Plutôt que d’utiliser les termes “tête/poitrine/mixte”, cette approche met l’accent sur le contrôle des structures anatomiques.
Complete Vocal Technique (CVT), repose sur le même principe, avec des “modes” qui combinent physiologie et acoustique.
Des critiques...
Si ces approches permettent d’explorer les richesses de la voix de manière détaillée, elles présentent certaines limites. Elles tendent à isoler les éléments vocaux sans toujours considérer leur interdépendance. Or, toute modification d’un élément du larynx impacte l’ensemble du conduit vocal. L’apprentissage vocal ne peut se réduire à un assemblage de “pièces” sans prendre en compte le système global.
De plus, chaque chanteur développe des habitudes et des schémas propres. Un apprentissage basé uniquement sur des classifications rigides peut conduire à une compréhension et un apprentissage superficiel et limiter l’exploration des possibilités vocales
Comment apprendre à faire la voix mixte, la voix de tête et la voix de poitrine?
Si vous lisez ces lignes, c’est sans doute par envie de mieux comprendre votre propre voix, d’identifier ses différents registres et de les maîtriser. Peut-être souhaitez-vous explorer vos aigus avec plus de puissance ?
Vous avez essayé les exercices des tutoriels YouTube ou les vocalises qu’on vous a données, mais les résultats ne sont pas durables ? C’est normal. Appliquer des recettes toutes faites ne suffit pas à un apprentissage réel.
L’essentiel est d’explorer par vous-même, car personne ne peut connaître et ne devrait comprendre votre voix mieux que vous.
Vous accompagner dans votre apprentissage du chant, c’est créer des situations qui vous permettent de comprendre ce que vous faites. Cette connaissance de soi va naturellement faire émerger votre capacité à faire ce que vous voulez.
C’est ce que je vous propose de deux manières différentes:
- des cours de chant à Paris
- des cours de chant en ligne et la formation